Bethlehem /PNN/
Par Mohammed Al-Laham, Président du Comité des Libertés - Syndicat des Journalistes Palestiniens
L'année 2024 a été témoin de la poursuite d'un sombre chapitre marqué par les violences de l'occupation israélienne. À la fin de cette année sanglante, le bilan s'élève à environ 46 000 Palestiniens tués, dont 193 journalistes, depuis le début de l'offensive du 7 octobre 2023.
Cette année de massacres dépasse les limites du terme "génocide" pour décrire les atrocités infligées au peuple palestinien et, en particulier, aux journalistes. Ces derniers ont été délibérément pris pour cible par des missiles, des obus d’artillerie et des balles de tireurs d'élite, dans une tentative de museler la vérité.
En 2023, les forces israéliennes ont tué 102 journalistes en seulement trois mois. Cette répression contre la liberté de la presse n’a fait que s’intensifier. Photographes, correspondants, rédacteurs et techniciens des médias ont été assassinés, leur travail mettant en lumière une réalité brutale et brisant le voile de propagande qu’Israël tente de maintenir depuis des décennies.
En 2024, le journalisme palestinien a écrit un nouveau chapitre dans l'histoire des médias mondiaux, mêlant professionnalisme, patriotisme et humanité. Ce sacrifice a eu un coût inestimable : 91 journalistes ont perdu la vie, certains de leurs corps restant sous les décombres. Des dizaines d’autres croupissent dans les prisons israéliennes, subissant torture et souffrance.
Cibler la Vérité : Un Modèle Mortel
disparité frappante s'est manifestée dans les chiffres des victimes parmi les journalistes dans les zones de guerre : le nombre de morts a largement dépassé celui des blessés ou des détenus. Ce constat reflète une politique délibérée des forces israéliennes visant à éliminer les journalistes plutôt qu'à simplement les intimider. Qu'ils soient pris pour cible par des frappes de drones, des obus d'artillerie ou des tirs de tireurs d'élite, les journalistes sont souvent considérés comme des menaces directes et marqués pour être abattus.
L’utilisation accrue de drones armés en 2024 représente un tournant sinistre. Ces drones, chargés d’explosifs et contrôlés à distance, ont coûté la vie à 29 journalistes en une seule année. Cette technologie illustre une escalade dans les méthodes utilisées pour réprimer la liberté d'expression.
Nouveaux Outils de Répression
L'armée israélienne a également introduit des mesures punitives sans précédent, notamment le ciblage délibéré des familles des journalistes comme forme de punition collective. Par ailleurs, les balles destinées à intimider les journalistes ont été utilisées beaucoup plus fréquemment que les gaz lacrymogènes ou les grenades assourdissantes, marquant un changement dans les tactiques de répression.
Les disparitions forcées, les arrestations arbitraires et les actes de torture – en particulier contre les femmes journalistes – ont atteint des niveaux sans précédent en 2024. De même, les violences des colons contre les journalistes, autrefois rares, sont devenues courantes, reflétant une perte de contrôle croissante de l’armée israélienne sur le monopole de la répression.
Documenter les Atrocités
Les efforts pour documenter ces violations se heurtent à des défis immenses, en particulier à Gaza, où la violence incessante de l'occupation n’épargne personne. Malgré ces difficultés, le travail d’enregistrement de ces crimes reste essentiel pour exposer la vérité et inciter la communauté internationale à agir pour protéger les journalistes.
2024 : Une Année de Blessures Humaines et de Nouveaux Outils de Documentation.
L’année 2024 a vu une augmentation des catégories de violations contre les journalistes, passant de 10 à 21. Cette expansion reflète l’introduction de nouvelles méthodes de répression et de violence, notamment les frappes de drones, les assassinats ciblant les familles, et l’agression accrue des colons.
La brutalité de 2024 a laissé une empreinte indélébile sur le journalisme palestinien, soulignant le besoin urgent de solidarité et d’action mondiale pour protéger ceux qui risquent leur vie pour révéler la vérité.
91 journalistes tués, dont 23 femmes
L'année 2024 a marqué une tragédie sans précédent pour les journalistes palestiniens, avec 91 travailleurs des médias tués, tous originaires de Gaza. Parmi eux, 23 femmes journalistes ont perdu la vie, beaucoup lors d'événements à forte mortalité, comme des attaques où cinq journalistes ont été tués d’un coup, quatre dans une autre, et trois dans une autre encore. La majorité de ces journalistes ont été tués par des frappes aériennes, des drones, des obus d'artillerie ou des tirs de tireurs d'élite.
Familles de journalistes prises pour cible
En 2024, environ 164 proches de journalistes ont été tués lors de frappes aériennes visant leurs maisons. De nombreux journalistes ont perdu leur famille entière, payant ainsi le prix ultime pour leur profession. En outre, 53 maisons appartenant à des journalistes ont été détruites.
Blessures sanglantes et soins négligés
Au moins 86 journalistes ont été blessés, certains mortellement, faute de soins médicaux adaptés. La violence omniprésente a défini l’expérience palestinienne en 2024, les journalistes souffrant aux côtés de leurs communautés.
Arrestations, disparitions forcées et torture
Au moins 64 journalistes ont été arrêtés en Cisjordanie et à Gaza. Certains restent en détention administrative sans inculpation ni procès équitable, tandis que d'autres ont été temporairement détenus et soumis à des actes de torture. Parmi les détenus, 15 ont subi des interrogatoires, et 27 ont été jugés par des tribunaux militaires.
Les femmes journalistes ont également été visées, avec au moins 20 détentions sous des accusations douteuses d’« incitation ». Les disparitions forcées ont considérablement augmenté, comme dans les cas de Nidal Al-Wahidi, de la chaîne Al-Najah TV et New Press, et de Haitham Abdul Wahid, de Eye Media. Certains ont été retrouvés après des semaines d’incertitude, tandis que d’autres restent portés disparus.
Attaques incessantes contre les institutions médiatiques
Les organisations médiatiques ont subi des attaques graves, avec 54 cas de destruction, de confiscation ou de vandalisme signalés. De plus, 28 institutions ont été fermées ou forcées à des suspensions prolongées par les autorités israéliennes.
Restrictions et violences généralisées
Les journalistes ont été confrontés à 367 incidents de détention ou d’obstruction dans l’exercice de leur travail, principalement en Cisjordanie. Ces incidents incluent souvent des agressions physiques, des insultes et la confiscation d’équipements, y compris la suppression de séquences enregistrées.
L’usage accru de munitions réelles a été notable, avec 148 incidents de tirs sur des journalistes, contre 85 cas d’inhalation de gaz lacrymogène. Les agressions physiques, notamment les coups de crosse, les matraques et les coups de pied, ont été rapportées dans 58 cas.
Violence des colons et attaques de véhicules
Les attaques de colons contre les journalistes ont considérablement augmenté, avec 27 incidents enregistrés, notamment à Jérusalem. Ces attaques, souvent accompagnées de menaces armées, ont entraîné des blessures nécessitant une hospitalisation. De plus, 23 cas de journalistes heurtés ou faiblement évités par des véhicules militaires ont été signalés.
Autres formes de ciblage
Les journalistes ont également été confrontés à la destruction des infrastructures de communication, à des interdictions de voyage, à des descentes à domicile et à la confiscation d’équipements, notamment des caméras, des appareils mobiles et des biens personnels.
Observations conclusives
Les données de 2024 mettent en lumière une politique systématique du gouvernement israélien visant à réprimer les journalistes palestiniens. Ce n’est pas uniquement le résultat de décisions de terrain, mais une stratégie institutionnelle impliquant des branches politiques, militaires et judiciaires, ainsi que des colons. Même la Cour suprême israélienne a rejeté une demande de l’Association de la presse étrangère pour permettre une couverture à Gaza, soulignant davantage cette complicité institutionnelle.
Le ciblage des familles des journalistes, la destruction de leurs maisons et l’utilisation de munitions réelles reflètent une stratégie délibérée visant à instaurer la peur et à réduire au silence ceux qui rapportent la vérité. Ces actions défient les conventions et normes internationales, sans précédent pour de telles violences systématiques contre les journalistes dans le monde.
Recommandations
Le ciblage incessant des journalistes palestiniens constitue une grave violation de la liberté de la presse et des droits humains. Sans efforts concertés pour aborder ces abus, la vérité risque d’être enterrée aux côtés de ceux qui osent la rapporter.
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